Éloge du Pokemon Go.
 


Certainement moult littérature qui produira du sens commandera d’y tourner le dos. L’injonction professorale d’en éviter l’usage et même la mention.
 
Et puis la batterie de postures viendra ajouter au pestacle. Qui en jouera clandestinement, qui s’en détournera tel le pénitent. Qui s’offusquera des temps nouveaux qui démentent les anciens. Et encore quoi.
 
Cortèges de spécialistes autopsierons les usager.ère.s dont le cortex zombifié ne déclare déjà rien de plus qu’un sujet d’étude post-mortem. Péroraisons vindicatives et autels de la doxa en énoncerons les méfaits apocalyptiques et contagieux.
 
Palabres palabres palabres.
 
Pokemon Go est un jeu. Et comme tous les jeux, il nous sort de cette vieille réalité mesquine et suffocante. Il entreprend de remettre à plat des rapports tendus et compétitifs. En effet, plus personne ne regarde autrui en dehors des dispositifs prévus. Et la grille de lecture automatique qui s’impose contient et la comparaison concurrentielle et les calculs narcissiques itératifs.
 
Comme tous les jeux, le ressort en est virtuel. Démultiplié en l’espèce par le support ad hoc qui le répand. Et qui le répand singulièrement, ce qui le rend suspect. Mais.
Certes ce jeux détient en lui les germes du vieux monde. Mais.
Mais il contient également les semences du monde nouveau qu’il nous reste à bâtir. Pokemon Go et ses desseins : grégaires, décérébrés, aliénants, cache une faconde que l’on aurait intérêt à identifier et à s’approprier.
 
Si l’outil, domestiqué l’on y viendra, devient la source des convergences qui nous font défaut. De ces égrégores qui tendent ensemble vers un commun épar. Si ces rires saccadés, encore névrosés s’apaisent, et produisent un socle rationnel. Que la dynamique conduit à un plaisir distancié, critique et séditieux ; le Pokemon Go nous prépare de jolies surprises. Si l’on y survit.
 
Mais surtout, adulte lambda. Porteur d’autorité et standard consumériste cohérent, n’en tient aucun compte. Surtout cultive ton indignation d’appareil et tes usages scolastiques. Tu crois que ce sont elleux les mort.e.s. Continue de pointer le doigt plutôt que de lever le regard. Et recroquevillé sur ton aigreur, incapable du jeu, du rire et de la fantaisie. Incapable de te tromper. De choir et de recommencer. Évite de passer la porte dialectique. Reproduit les prêt-à-penser qui affleurent, sans n’en produire aucune réflexion. Campe au fond de la caverne camarade.
maudichu2
Nous le monde moderne, la réalité technologique nous hèlent. Ses rituels nouveaux et ses cultes augmentés. Les processions extatiques et les idoles miniatures et multicolores remportent nos dévotions. L’enfance devenue l’horizon indépassable des événements, enfin voici quelques lieux suspendus. Enfin l’on s’extrait (s’aliène?) des souffrances vaines qui nous assaillent et nous encerclent. Et l’on devrait y renoncer ?
 
Nous aurons dans un coin les zombies du Pokemon Go et de l’autre les zombies de l’anti-Pokemon Go. Et enfin nos contentieux cesseront. L’obscurité s’installera, qu’aucune lueur ne viendra plus contrarier. Sans jamais ne l’avoir détecté, nous aurons accomplis l’ultime gageure. En désaccord sur tout, nous nous serons rejoint dans le rien. Définitif.
 
Du cénotaphe, vide comme il convient, voici par avance l’épitaphe, solennelle la sentence gravée, intemporelle ; livrée à notre postérité caduque :
 
L’on détecte la qualité du monde réel que l’on produit à la vacuité de l’imaginaire que l’on s’invente.

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